Carte blanche : Défendre les détaché·es pédagogiques – Défendre le secteur Jeunesse

26 novembre 2025 Elisabeth Fiévez

Dans un contexte politique où les secteurs de la jeunesse et associatif font face à des politiques publiques toujours plus restrictives, nous, Organisations de Jeunesse de Relie-F, refusons de rester silencieuses. Aujourd’hui, nous souhaitons rappeler une évidence : la suppression massive des détaché·es pédagogiques fragilise directement l’éducation des jeunes, l’action citoyenne et l’avenir démocratique de notre société.

La ministre de la Jeunesse affirme vouloir conserver uniquement 35 détaché·es pédagogiques en invoquant une prétendue « expertise pédagogique » spécifique. Or, toutes les personnes détachées ont été sélectionnées précisément pour cette expertise. L’ensemble des DP exercent au quotidien des missions centrales à la formation de CRACS : animation et formation de jeunes, coordination de projets, accompagnement d’équipes éducatives, conception d’outils pédagogiques, plaidoyer, développement d’activités, et ce parfois jusqu’à 200 activités par an.

Présenter les détaché·es pédagogiques comme responsables d’une pénurie dans les classes, c’est méconnaître le travail réel de ces professionnel·les et la nature même de l’éducation. L’éducation ne se limite pas à l’école : elle se construit aussi dans les pratiques non formelles, dans les espaces d’expression, d’émancipation et de participation citoyenne que nos organisations offrent depuis des décennies. Les DP renforcent concrètement le lien entre enseignement et secteur Jeunesse, soutiennent les équipes éducatives, accompagnent les jeunes en difficulté, luttent contre les discriminations, développent l’EVRAS et des activités dans le cadre du PECA, déconstruisent les stéréotypes, produisent des outils pédagogiques de qualité et permettent aux organisations de rpondre à la demande croissante des écoles.

Leur retrait serait dévastateur : surcharge de travail pour les équipes, perte d’expertise, diminution du nombre d’activités, affaiblissement des partenariats avec les écoles, recul de la qualité pédagogique, difficultés financières pour engager des remplaçant·es et pour beaucoup d’OJ, un retour à un fonctionnement « en mode survie » plutôt qu’à un travail structurel et innovant. Pour certaines organisations, la présence d’un·e DP est un vrai changement de paradigme, permettant de passer de la simple maintenance à la création, à la transformation, à une offre réellement adaptée aux réalités des jeunes !

Les DP apportent une valeur unique : leur double expertise — enseignement et éducation non formelle — crée ce pont indispensable entre les jeunes, le terrain, les équipes éducatives et la société. Ils et elles assurent la cohérence éducative de projets citoyens, soutiennent les équipes volontaires, accompagnent les jeunes dans leurs initiatives, garantissent le respect des valeurs démocratiques, et transmettent un regard critique essentiel dans une époque marquée par les inégalités, les discriminations et la montée des extrêmes.

Nos organisations ont été créées au lendemain de la Seconde Guerre mondiale pour éviter qu’un pouvoir institutionnel n’impose une vision unique de la jeunesse. Aujourd’hui encore, la diversité, l’autonomie et l’indépendance du secteur Jeunesse sont des garantes du pluralisme démocratique si cher à Relie-F. Saper les DP, c’est affaiblir ces fondements !

Nous demandons donc à la Fédération Wallonie-Bruxelles de faire un choix éclairé, car c’est le seul choix cohérent pour préserver une politique de jeunesse ambitieuse, pluraliste et émancipatrice. Défendre les DP, c’est défendre les jeunes, défendre la démocratie, défendre l’intérêt général.

Pourquoi seul le secteur Jeunesse est-il touché par les retraits des professeur·es détaché·es ? Pourquoi les derniers détaché·es dans les ministères, administrations et autres, ne sont-ils et elles pas impacté·es, alors que ces professionnel·les sont bien plus éloigné·es du public jeune ?

Plus que jamais, nous appelons à une vision politique courageuse, à la hauteur des défis éducatifs, sociaux et citoyens qui attendent la prochaine génération.

Nos revendications pour Relie-F fort et cohérent :

  • Maintenir l’ensemble des postes de détaché·es pédagogiques dans le secteur Jeunesse, sans réduction arbitraire du dispositif.
  • Reconnaître officiellement l’expertise pédagogique des DP, au même titre que celle du personnel enseignant.
  • Garantir la durée standard des détachements (3 ans) pour assurer la stabilité des projets éducatifs.
  • Protéger l’indépendance et la diversité des organisations de jeunesse, piliers historiques du pluralisme démocratique.
  • Investir structurellement dans l’éducation non formelle, complément indispensable à l’école pour former des CRACS.
  • Renforcer les ponts entre écoles et organisations de jeunesse, et reconnaître la plus-value des DP dans ce rôle de médiation.
  • Garantir des moyens financiers adaptés aux réalités et missions des OJ pour éviter la surcharge des équipes.